MAISON DES EVERHART-2010 Nous étions assis tous les quatre autour de la table dans notre grande salle à dîner. Au bout de la table, il y avait mon père. À sa droite, ma mère et de l'autre coté moi et ma soeur. Cela avait toujours été comme ça depuis notre tendre enfance, nous avions nos places et nous ne changions jamais. Nous venions de terminer notre prière habituelle et notre repas commençait en silence.
« Je voudrais prendre un moment pour souligner l'admission à l'université de Camelya. Bravo chérie, je suis fier de toi. » Je soupira discrètement, ne levant pas les yeux de mon assiette. Mon père venait de dire à ma soeur qu'il était fier d'elle. Ces mots, je les avais attendu toute ma vie et jamais il ne me les avait adressés. Pourquoi ? Je n'en avais aucune idée. Ma mère la félicita encore une fois à son tour pendant que moi, je restais muette. « Princesse, tu pourrais au moins lui dire quelque chose. » Bien sûr, Camelya la parfaite méritait toute l'attention du monde, mais moi, est-ce qu'on prenait le temps de me féliciter pour le poste d'enseignante que je venais tout juste d'obtenir. Je ne crois pas.
« Bravo. C'est une excellente nouvelle pour toi.» Murmurai-je les yeux toujours rivés sur mon repas.
« Jamie, tu pourrais être plus polie. » En quoi avais-je été impolie ? Je n'en avais pas la moindre idée.
« Bien sûr, Camelya mérite toute l'attention du monde parce qu'elle a été admise à l'université, mais moi, on ne dit rien sur mon nouvel emploi. Je n'ai peut-être pas suivi le chemin que vous auriez voulu que je prenne, mais est-ce une raison pour ignorer complètement mes réussites ? » En disant cela, je fixais mon père, puisque cela s'adressait beaucoup plus à lui qu'à ma mère. Mon père ne cessait de me critiquer et ce depuis plusieurs années. L'évènement déclencheur, ma relation avec Zéphyr, qu'il n'appréciait pas le moindre du monde.
« Jamie, tu sais bien que c'est faux et qu'on est tout aussi fiers de toi que l'on peut l'être de Camelya. » Mon père restait silencieux. C'était beaucoup trop difficile pour lui d'admettre que j'avais raison. Sans rien ajouter de plus, je quitta la table, geste qui n'était évidemment pas autorisé lors de nos repas familiaux. Mais ce soir là, je n'en avais rien à faire des bonnes manières.
FAIRVIEW-2006 FAIRVIEW - 2006.
« C'est pas vrai. J'ai définitivement la poisse.» Nous étions en janvier. C'était en milieu d'après-midi, j'avais décidé de me rendre à l'université en vue d'étudier pour un gros examen. Cependant, je n'avais jamais pu me rendre jusque là, ma voiture étant tombée en panne à mi-chemin. Pour ajouter à ma journée merdique, il pleuvait abondamment depuis plusieurs heures déjà. Je sortis mon téléphone de mon sac à main, cherchant le numéro du garage le plus proche. J'appelai, une fois. Deux fois. Trois fois. Aucune réponse. Gé-ni-al. Il ne manquait plus que ça. Pour couronner le tout, j'avais eu la brillante idée de mettre mes nouvelles bottes à talons haut ce matin là et j'avais oublié mon parapluie dans l'entrée. J'allais devoir me résoudre à marcher. Je n'avais aucune idée de la distance que je devais parcourir pour me rendre jusqu'au garage, ni de combien de temps cela allait me prendre. J’espérais y arriver avant la tombée de la nuit. Complètement trempée, j’arrivai un quart d'heure plus tard devant le garage. Heureusement, l’enseigne ouvert était affichée sur la porte. Je passa la porte, de très mauvaise humeur. J'en oubliais même mes bonnes manières.
«Je viens de faire deux kilomètres à pied sous la pluie car votre téléphone ne fonctionne même pas, ma voiture est tombée en panne et j'aurai aimé un coup de main. » Je fixais le jeune homme qui me regardait légèrement amusée. Je devais franchement ne pas être très belle à voir. Mes cheveux étaient aplatis sur ma tête et j'étais persuadée que mon maquillage avait coulé. Les clés de la camionnette du garage en main, le jeune homme m'invita à le suivre.
« Vous montez pas ? » « Mon père m'a toujours dit de ne pas monter avec des inconnus. » Effectivement, j'aurais préféré l'attendre ici. Je ne le connaissais pas et je n'étais pas d'humeur à discuter avec un inconnu aujourd'hui. Malgré tout, il insista pour que je ne reste pas seule ici et je finis par accepter de monter avec lui. Les nouvelles pour ma voiture n'était pas bonnes. J'allais devoir m'en passer pendant quelques jours.
« Je pourrais avoir votre numéro ? » Définitivement, il n'avait pas la langue dans sa poche. En quel honneur me demandait-il mon numéro ? Comme technique de drague j'avais vu mieux.
« C'est de la drague ? » « C'est pour la voiture. » Évidemment, quelle idiote. Maintenant, il devait penser que j'étais intéressée. Enfin, ce n'était pas totalement faux il fallait que je l'avoue, il était plutôt charmant. Mais je n'envisageais pas du tout de tomber amoureuse à ce moment là. Comme quoi c'est toujours dans les moments les plus inattendus que l'amour frappe à notre porte.
FAIRVIEW-2006 MAISON DES EVERHART 2007. Je fréquentais Zephyr depuis presqu'un an. J'avais attendu que cela soit sérieux avant de le présenter officiellement à mes parents. Un an, cela pouvait paraître long, mais je connaissais mes parents. Ils n'auraient pas approuvé que j'aie une relation amoureuse si jeune, j'avais donc préférer leur en parler le moins possible. Ce soir là, j'avais invité Zephyr à souper chez moi. J'espérais que tout se passe bien. Entre Zephyr et moi, tout était arrivé rapidement. Moi qui n'avais pas eu beaucoup de relations sérieuses jusqu'à maintenant, du à mes valeurs familiales, j'étais tombée éperdument amoureuse de lui, sans l'avoir vu venir. Il n'était pas comme tous les autres hommes que j'avais connu auparavant. Cependant, il ne venait pas du même milieu que moi et je redoutais la réaction de mon père lorsqu'il l'apprendrait.
« À quel université étudie-tu Zephyr ? » Cela avait été l'une des premières questions de mon père. Il voulait évidemment savoir s'il faisait des études en médecine. Mon père m'avait toujours dit que je me devais d'épouser un grand médecin, tout comme lui. Je posa mon regard sur Zephyr. Il était mal à l'aise, cela se voyait.
« J'ai mis mes études de coté pour quelques temps monsieur. Je suis mécanicien à temps plein. » Je mis ma main sur son genou, pour le rassurer. Le visage de mon père changea du tout au tout. Il ne disait rien, pour être poli, mais j'étais parfaitement capable de lire dans ses pensées. Le reste du repas se déroula dans une ambiance assez froide. Ma mère faisait des efforts pour apprendre à connaître mon petit ami tandis que mon père restait muet. À la fin du repas, mon père sortit de table, me demandant de le suivre.
« Je sais ce que tu vas dire papa, mais je l'aime et il m'aime lui aussi. » « Il ne vient pas d'une famille aisée comme la nôtre Jamie. Il n'a pas d'études, pas d'argent, pas d'avenir. Il n'est pas assez bien pour toi. » Je n'allais pas laisser mon père guider ma vie amoureuse.
« C'est faux. Il n'est pas assez bien pour TOI papa. Que tu l'acceptes ou non, je ne vais pas rompre avec lui pour te faire plaisir.» Que mon père n'apprécie pas mon petit ami m'importait peu. Un jour il allait se faire à l'idée que lui et moi nous étions fait l'un pour l'autre.
« Je vois très bien que ton père ne m'apprécie pas Jamie. » « Je suis désolée. Mais ça ne change pas mon opinion à moi. Mon père ne m'empêchera pas de t'aimer. » À ses mots, je l'avais embrassé passionnément. Avec Zephyr je me sentais libre. Avec lui, je n'étais pas obligé d'être la fille parfaite. Avec lui, je m'évadais de ma famille trop conservatrice. Je découvrais la vie.
FAIRVIEW- IL Y A QUELQUES SEMAINES Aucune relation sexuelle avant le mariage. Voilà ce que ma famille avait toujours prôné. Cependant, pour Zephyr, c'était quelque chose de complètement incompréhensible. Il ne voulait pas attendre jusqu'au mariage et étant donné que j'avais énormément confiance en lui et que j'avais foi immense en notre couple, il m'avait convaincu de ne pas attendre le mariage. Le fait d'être fiancés suffirait. Quelle erreur. Je ne pensais jamais que cela entraînerait autant de répercussions. Il avait fallu d'une seule nuit passée ensemble pour que je tombe enceinte. Je n'en croyais pas mes yeux. J'allais définitivement aller en enfer. Déjà que mon père n'approuvait pas cette relation, il n'allait pas apprécié le fait de me savoir fiancée et si je lui annonçais que j'étais enceinte, je devrais d'abord préparer mon testament. Il était impossible que je lui en parle. Mais il était également impossible que je me fasse avorter. J'étais catholique et totalement contre l'avortement. Il fallait avant tout que je l'annonce à Zephyr. Lui non plus risquait de ne pas très bien réagir à cette nouvelle.
« Qu'est-ce qu'il y a Jamie ? Tu es bizarre aujourd'hui. Tu sais que tu peut tout me dire.» « Je suis enceinte.» J'aurais pu lui donner un coup de poing au visage que cela aurait eu le même effet. J'étais vierge et du jour au lendemain je me retrouvais enceinte. Qu'avais-je fait à Dieu pour mériter cela ?
« On panique pas. On ne panique pas. » Simple à dire mais complexe à faire. J'étais paniquée, j'avais la peur de ma vie. Je n'étais pas prête pour ça, pas maintenant.
« Comment tu veut que je reste calme. Tu vois je te l'avais dis qu'il fallait attendre le mariage ! Dieu m'a puni ! » Cela pouvait paraître idiot, mais je n'en pensais pas moins.
« Oh je t'en prie pas maintenant hein. » Pour lui c'était complètement ridicule. Il ne comprenait pas tout ce que cela représentait pour moi.
« Tu ne comprends rien, rien ! » J'étais partie en lui balançant un magazine en plein visage. Je m'en voulais de lui avoir fait confiance. Il m'avait promis que tout irait bien. Il avait tout gâché. Mon père avait raison. Qu'allions-nous devenir ? Il était évident qu'aucun de nous n'était prêt à devenir parents. Pas dans l'immédiat du moins.